Message de Patricia Mirallès Secrétaire d’Etat auprès du ministre des Armées, chargée des Anciens combattants et de la mémoire Journée nationale de la Résistance 27 mai 2024
Il y a 81 ans, au numéro 48 de la rue du Four, la France, meurtrie et trahie, avait rendez-vous avec la République, qu’il lui tardait de retrouver. Il y a 81 ans, au numéro 48 de la rue du Four, la Résistance rassemblait le désordre de courage qui la constituait pour le transformer en une force ardente, résolue et inflexible. La force d’un refus, qu’avait déjà exprimé le général de Gaulle en 1940, et qui n’avait depuis cessé de croître.
La Résistance est née au cœur du plus atroce effondrement de notre histoire, à l’heure où les chaudes nuits d’été se font assassines ; à l’heure du vol feutré des parachutes alliés faisant pleuvoir armes ou combattants et dont la vue soulageait tout un maquis ; à l’heure des rafles dans les matins blêmes ; à l’heure des caves et des cellules, où résonnent les cris des innocents qu’on y torture. A l’heure des greniers que l’on ouvre, pour y cacher Juifs ou résistants.
Comme il fallait croire en l’honneur, en la France et en ses alliés pour rejoindre l’armée des ombres ! Qu’y avait-il de commun entre toutes ces femmes et ces hommes ordinaires qui se sont grandis dans les évènements ? Ni classe sociale, ni religion, encore moins de parti politique. Mais l’espérance et l’amour de la République, qui gouvernaient ces vies clandestines. Chez ces soldats de nécessité, dans le sublime de leur lutte et le tragique de leur mort, notre pays a su trouver quelque chose en lui après la désolation.
Hommes et femmes, les résistants se sont engagés dans cette aventure hasardeuse sans calculs, sans garanties, et avec cette modestie qui les caractérisait. Ils étaient ces milliers qui, en arpentant des chemins différents, en sillonnant nos régions et nos cantons, traçaient les traits de cette France qui relevait doucement la tête.
La Résistance prît de nombreuses formes et de nombreux visages.
Ce sont celles et ceux qui gagnèrent le maquis, car ils préféraient la rudesse honnête de la vie sauvage à la compromission honteuse dont ils étaient les témoins révoltés.
Ce sont celles et ceux qui firent sauter des ponts pour retarder une division allemande, ou pour faire dérailler une livraison d’armes.
Ce sont ces imprimeries clandestines qui n’étaient pas enchainées et tenaient un discours de vérité, annonçant ainsi le retour d’une presse libre, composante essentielle à une démocratie pérenne.
Ce sont ces étrangers, combattants comme Missak Manouchian et son groupe, que la Nation reconnaissante a fait entrer au Panthéon, ou protecteurs comme Sabine Zlatin, l’infirmière juive d’origine polonaise, la Dame d’Izieu bouleversée par la rafle des enfants qu’elle cachait. Ces étrangers, Français par le choix et le sang versé, qui n’ont pas trahi.
Ce sont celles et ceux qui partirent pour l’Angleterre, l’Algérie ou le Maroc pour rejoindre les Forces Françaises Libres et préparer le retour au pays natal, dont ils avaient l’exil en horreur.
Ce sont toutes celles et ceux qui, capturés chez eux ou au maquis, dans les matins trompeurs ou les nuits douloureuses, ont crié « vive la France », comme Marc Bloch avant de tomber, ou bien, comme Jean Moulin, qui se sont élevés dans le silence gardé.
Enfin, ce sont les femmes et les hommes qui, il y a 80 ans, dans le secret des plans et la hâte du lendemain, ont préparé les Débarquements. Sans leurs actions décisives, s’ils n’avaient pu informer comme ils l’ont fait, si les routes n’avaient pas été coupées, les ponts effondrés et les convois attaqués, les Débarquements n’auraient sans doute pas eu le même succès, et les pertes auraient été plus importantes.
Chez eux, la lucidité n’avait pas conduit au découragement. Ils étaient les meilleurs fils et filles du vieux pays écroulé et, comme le disait l’un d’entre eux, poète de Provence aux mains rocailleuses et à l’esprit si grand, « les degrés solitaires d’une gloire collective ».
La Résistance aux insomnies nécessaires, la Résistance aux martyrs innombrables n’était pas seulement le mouvement d’hommes et de femmes qui avaient dit non. Elle était aussi celui de bâtisseurs qui avaient en partage l’unité des buts et des sentiments.
Comme le disait Pierre Brossolette, « les morts de la Résistance ne nous demandent pas de les plaindre, mais de les continuer. Ils n’attendent pas de nous un regret, mais un serment ; pas un sanglot, mais un élan ».
Cet élan, c’est celui de la Libération et de ce qui lui succèdera, car c’est aussi cela, la Résistance : une refondation radicale.
Refondation sociale, avec déjà l’idée de la sécurité sociale, du droit au travail, du besoin d’une élite non de naissance mais de mérite.
Refondation économique qui, dépassant la reconstruction, a donné à notre pays les moyens de son indépendance et de sa prospérité.
Refondation politique et morale avec le programme du Conseil National de la Résistance, bien sûr, mais il y a aussi et surtout les hommes et les femmes, anciens résistants, qui ont permis de le réaliser. Il y a celles et ceux qui, élus locaux, parlementaires ou ministres, se sont engagés en politiques pour réaliser ce à quoi ils avaient rêvé pendant l’occupation.
Aujourd’hui encore, plus de 80 ans après, nous pouvons donner du sens à l’héritage de la Résistance, qui est aussi une leçon. Celle de ne jamais perdre espoir, pour soi comme pour les autres, parce qu’un sursaut est toujours possible. Celle de ne jamais transiger sur l’honneur, la République et ses valeurs, car ce sont des guides qui ne s’égarent pas.
A jamais, la flamme de la Résistance éclairera la République et le chemin de toutes celles et ceux qui la partagent.
Vive la République !
Vive la France !
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